Discuter avec Wilkens Mathieu à l’approche du plus gros combat de sa carrière, c’est un peu comme parler avec un vieux sage. Jusqu’à ce qu’on réalise que le boxeur n’a que 20 ans, mais que sa jeunesse ne l’empêche certainement pas d’être doté d’une vision claire de la vie.
Mathieu (14-0-0, 10 K.-O.) est considéré comme une étoile montante de la boxe québécoise. Le pugiliste de Québec s’apprête à affronter son compatriote de Brossard Shakeel Phinn (27-3-2, 17 K.-O.), de 14 ans son aîné, jeudi soir, à l’occasion du gala de Eye of the Tiger Management au Casino de Montréal.
Pour l’occasion, les ceintures continentales des Amériques du WBC et de la NABF des super-moyens (168 livres) seront à l’enjeu.
Pour Mathieu, c’est l’occasion de se hisser dans le top 15 des différents classements mondiaux. Combien de jeunots de 20 ans seraient surexcités par une telle opportunité? Ou tétanisés devant l’ampleur de la tâche? Pas Wilkens Mathieu.
«C’est de loin mon plus gros défi en carrière. Je suis content et reconnaissant. En même temps, je suis quelqu’un qui a toujours planifié ma vie. Le fait que ce combat pour un titre arrive aussi rapidement, ce n’est pas une grande surprise. Je l’avais déjà envisagé.
«Je savais que je tournerais pro à 18 ans. C’est ce qui est arrivé. Je savais qu’en arrivant chez les professionnels, je ferais sept combats à chacune de mes deux premières années pour rester actif. C’est ce qui est arrivé. Je savais qu’à ma troisième année, il faudrait que j’aille chercher des titres mineurs et c’est ce qui va arriver. Tout ce qui arrive, dans ma tête, c’était déjà écrit. Tout ce qui se passe fait simplement partie du plan», lance-t-il tout bonnement.
Une carrière en accéléré
Wilkens Mathieu a vaincu Patrik Fiala au Cabaret du Casino de Montréal, le 7 mars 2024.
Photo MARTIN CHEVALIER
Certains pourraient croire que Mathieu brûle les étapes. Peut-être, ou peut-être pas. La seule chose qui est sûre, c’est que, selon son plan, le boxeur n’a pas le loisir de se poser de telles questions.
Parce que justement, son plan vient avec des échéanciers serrés.
«J’ai accumulé deux bonnes années d’expérience. J’ai gagné en popularité au Québec et le monde aime mon style. Je veux continuer de monter dans les classements, être champion du monde d’ici deux ans et me retirer à 26 ans», tranche-t-il.
«Je n’ai pas de temps à perdre. Je ne veux pas boxer pendant 15 ans. Je veux me retirer à mon apogée, avec la vie devant moi. Je ne veux pas attendre que mes capacités commencent à dépérir. Je ne vais pas laisser la boxe me retirer. Je vais me retirer de la boxe», continue le verbomoteur de manière songée.
Des objectifs importants
Évidemment que, même avec le meilleur plan du monde, la boxe est remplie de surprises et qu’une contre-performance peut vite faire tout chambouler.
Mathieu en est bien conscient et insiste sur sa capacité d’adaptation. Ses détracteurs diront qu’il est arrogant de s’imaginer champion du monde d’ici deux ans, mais le cogneur voit les choses de manière plus philosophique.
«Si je me dis qu’on va voir comment les choses vont aller, je n’ai rien qui me pousse. J’ai besoin d’un objectif pour performer. La pression, j’en ai besoin pour atteindre mes buts. Je n’aime pas ça boxer sans savoir où je m’en vais.
«Ce qui rend un homme heureux, c’est d’avoir des buts. Je pense que les gens qui ne font rien dans leur vie, c’est là qu’ils deviennent malheureux. Il faut toujours avancer, même si tu deviens millionnaire ou que tu as tout atteint ce que tu voulais. On est fait comme ça, l’humain. Il faut un objectif à atteindre pour aller chercher l’excitation de vivre», résume-t-il.
Plusieurs intérêts
Et, s’il parle déjà de retraite possible à 26 ans, c’est que Wilkens Mathieu refuse de laisser uniquement la boxe le définir comme individu.
C’est pourquoi, sans vouloir entrer dans les détails, il affirme s’être déjà lancé en affaires dans un domaine qui «fonctionne très bien».
«Il y a beaucoup de boxeurs, sans nommer de noms, pour qui la boxe est leur unique identité. Sans la boxe, ils ne sont personne. La boxe est une partie de ma vie, mais ce n’est pas toute ma vie. J’aimerais être dans le cinéma. Je veux être mannequin. J’ai plein d’idées de business que j’aimerais lancer», précise-t-il.
Mais surtout, Mathieu insiste sur un point. Ce n’est pas parce qu’il rêve de mille et un projets qu’il n’a pas la tête à son projet principal.
«Je peux être la personne que je veux, mais il reste que la boxe, c’est mon premier amour depuis que je suis petit. J’ai toujours été passionné et il n’est pas question que je n’atteigne pas mes objectifs.»
Une demi-finale qui pourrait être une finale
PHOTO FOURNIE PAR VINCENT ETHIER / EYE OF THE TIGER MANAGEMENT
Au fil d’un long entretien avec Wilkens Mathieu, le boxeur de Québec a répondu à toutes nos questions de manière posée et réfléchie. Une seule fois, il a semblé quelque peu agacé…
En évoquant son combat face à Shakeel Phinn, on lui a demandé s’il sentait une pression additionnelle à livrer une première demi-finale en carrière. L’affrontement précédera le combat principal de la soirée au Casino de Montréal entre la Canadienne Mary Spencer (10-2-0, 6 K.-O.) et l’Américaine Mikaela Mayer (21-2, 5 K.-O.) pour les ceintures WBO et WBC des super mi-moyens.
«Ça adonne qu’il y a un gros combat qui implique Mary Spencer et son adversaire très connue aux États-Unis, donc la télévision privilégie leur combat en finale. Mais tu sais, mon combat aurait pu être une finale», réplique-t-il.
Peu importe, Mathieu sait fort bien qu’il peut s’agir d’un combat piège. Phinn n’a jamais subi une défaite par K.-O.
«Je ne veux pas dire que je vais être le premier à le coucher. Que je gagne par décision ou que je gagne par K.-O., l’important c’est que je gagne. D’habitude, mon état d’esprit, c’est de gagner par K.-O. pour être impressionnant. Ce combat-là, je veux le gagner à tout prix, peu importe comment. Je vais être très méticuleux et je veux être parfait. J’ai besoin d’être à mon meilleur pour le battre», analyse-t-il.
Deux boxeurs d’ici
Ironiquement, Phinn est un boxeur d’expérience que Mathieu a pris grand plaisir à observer pendant qu’il gravissait lui-même les échelons. Aujourd’hui, c’est lui qui se dresse devant son objectif de percer le top 15 mondial.
«Avant qu’on se batte ensemble, je suivais sa carrière et je souhaitais qu’il obtienne des opportunités de gros combats. C’est un Québécois et j’aime ça encourager les boxeurs chez nous, mais là, c’était un mauvais choix de tomber contre moi. Il va finir sa carrière contre un jeune prospect en ascension, mais écoute… il a décidé de m’affronter», laisse tomber le jeune combattant.
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